L’homme (et la femme)
politique français était-il malade ?
Je me posais très
sérieusement la question, ce soir-là.
Malade mentalement, il
(elle) l’était sans conteste.
Mentalement ?
(ma rêvasserie dériva : ne
devait-on pas subordonner toute prétention à une fonction élective à
l’obtention d’un certain niveau aux tests de QI les plus simples ? La
psychométrie était sans doute une science imparfaite, mais il était certain
qu’en dessous d’un certain seuil, il y avait vraiment un problème.
Ne voulant pas barrer
l’accès à la vie politique à des intelligences médiocres qui en font tout le
charme, j’aurais fixé ce seuil à, disons, 90 de QI (100 étant la moyenne). La
racaille d’en haut aurait continué à nous faire rire. Bref, le couperet ne
serait tombé qu’au niveau du crétinisme au sens médical du terme.)
On m’aurait objecté que de
véritables simples d’esprit n’auraient pas fait plus mal que les habiles
abrutis que nous avions aux manettes.
Oui.
Cela exigeait réflexion.
Là-dessus j’ai repris mon
bouquin. C’était Trois Hommes dans un Bateau, vingt fois relu ; l’un de ces amis fidèles qui
m’accompagnent dans mes solitaires pérégrinations nautiques.
Une thérapie économique
L’homme (et la femme)
politique étaient-ils physiquement malades ?
C’est la question que me
suggérait Jerome K Jerome quand
il décrivait les symptômes de cette insidieuse indisposition : « a
general disinclinetion to work of any kind » (un dégoût général pour
quelque forme de travail).
Cette horreur de l’effort,
Jérôme (je francise) feignait de s’étonner qu’elle pût être soignée, non par
des pilules, mais par quelques tapes vigoureuses appliquées sur le côté de la
tête. « Et aussi curieux que cela puisse paraître, ces tapes m’ont
souvent guéri (…). Vous savez, c’est souvent comme ça, ces remèdes de bonnes
femmes sont souvent plus efficaces que toute la pharmacopée ».
Un dégoût profond pour toute
forme d’effort : le personnel politique, et tout ce qui gravitait autour,
journalistes, z’artistes, était très fatigué, c’était évident, après de
nombreuses décennies de consanguinité dégénérative.
Comment soigner tout ce
monde ?
Pour mieux y réfléchir, j’ai
éteint la lumière parcimonieuse de ma cabine.
J’ai d’abord songé à une
grande maison de repos bisounours. Quelques travaux manuels, bêchage,
labourage, élevage de gentilles vaches à traire (cela, ils connaissent déjà)
auraient occupé le quotidien. Finies, les harassantes réunions et les
épuisantes parties de croche-pied entre collègues !
Puis j’ai pensé à un remède
moins dispendieux ; davantage à la portée d’une France au bord de la
banqueroute, et que seule la générosité de donateurs désintéressés, sinon au paiement
des intérêts de la dette, évitait d’être mise en faillite.
La solution, c’était
évidemment le clump.
Ces clumps sur le côté de la tête, dont Jérôme disait qu’aussi
étrange que cela puisse paraître, ils l’avaient mieux soigné que des boites
entières de pilules.
(Une thérapie économique,
peu d’effets secondaires, c’est les labos pharmaceutiques, la SS, Roselyne
Bachelot qui serait contente !)
Divertissement à la française
Qui n’a rêvé de gifles et de
coups de pied au cul, distribués sans parcimonie, pour réveiller les intellects
en veilleuse, les courages endormis ? De ces pare-à-virer qui réveillent
les somnolents, de ces soufflets qui sanctionnent mieux qu’un long discours, de
ces bottages de fesses qui rafraîchissent les méninges (attention, pas de
bavure : certains ont l’oignon fragile), de ces torgnoles qui font retrouver
la mémoire et stimulent les synapses paresseux.
Je confiai mon projet à un
ami (d’où sortait-il, celui-là ?). Il intervint :
- On n’y suffira pas. Ils
sont trop nombreux. On s’y est mis par centaines de mille, aux jours de
colère. Ils n’ont rien senti. La
baffe électorale, ça n’a pas marché non plus… Alors ?
- Tu n’y es pas, mon vieux.
L’heure n’est plus aux symboles, aux minauderies, aux gracieusetés. Je te parle
de véritables coups de pieds au cul, pas d’ersatz.
- Tu rêves. Les pieds nous
démangent, mais les culs sont haut placés, et bien protégés.
- D’autres ont su…
- Je vois. Une Révolution.
- En principe, je suis
contre. Elles n’ont jamais apporté que le pire. Juste un moment de défoulement,
que nous procurerait un chambardement bon enfant. Au final, pas de
grands mots, pas de têtes sur les piques, pas de bourgeois à la lanterne. Juste
un divertissement à la française. Léger. Populaire mais pas populacier :
songe à ces belles journées que seraient celles du coup de pied au cul,
administré aux nullardes et aux nullards qui prétendent diriger la France, lui
faire franchir les plus hauts obstacles, et trébuchent sur les moindres
taupinières.
- Il y en a de plus ou moins
méritants, il faudrait être équitable.
- Tu as raison. Il faudrait
établir un barème. Une simple connerie, genre Laurence Rossignol, une torgnole par connerie.
- Elle va avoir la tête qui
tourne.
- Brick Nicole, idem, et un an de soupe populaire.
- Perrichon Nicole, une baffe par cent mille contraventions annuelles pour
excès de vitesse … Disons, une baffe et demie, en gros.
- Valls Manuel, un coup de pied au cul chaque fois qu’il prononce
le mot « république ».
- Le boulet nommé Désir…
- Là, ça va être du lourd.
Taloche et bottage d’arrière-train. Avec circonstances atténuantes. Il ne sait
pas toujours ce qu’il dit, d’autres le lui soufflent.
- Le grand bazar oriental…
- On fera un prix de gros.
- NKM, qui a pris le métro, et qui y a vu comme un moment
de grâce…
- Double ration, pour
stupidité et trahison.
- Montebourg, Moscovici, Hamon ?
- De bonnes têtes à claques.
- Kader Arif, Fleur Pellerin ?
- Faut-il baffer
l’incompétence ?
- Aubry ?
- On prendra soin d’elle
avec beaucoup de care.
- Taubira ?
- Reconduite musclée en
Guyane, chez elle comme elle dit, puisque tout la gonfle, en France.
- Filipetti ?
- Les mandales, elle
connaît. Changeons de cible.
- Morelle Aquilino ?
- Botté avec des chaussures
de luxe.
- Strauss-Kahn ?
- Pan-pan cul-cul. On
choisira une main de femme.
- Il est capable d’en
redemander, le vicieux.
- Fabius ?
- Transfusion de coups de
savate.
- Et Hollande ?
- Traitement présidentiel.
« À l’Est ou à l’Ouest ? »
Et ça défilait. Le jury
délibérait peu, type Fouquier-Tinville, mais dans une ambiance de Foire du
Trône. Les accusés étaient conduits au tribunal avec de simples bourrades, les
gardiens étaient du genre bon enfant, avec de bons visages de paysans et
d’ouvriers, d’artisans et de modestes entrepreneurs. Leur figure ne ruisselait
pas toujours d’intelligence, mais la haine était absente, ou bien soigneusement
cachée sous l’hilarité de voir les puissants de la veille rabaissés comme
l’avait été auparavant la piétaille. On avait viré de bord. Les grands
étaient devenus les petits. L’avant-garde, qui auparavant donnait le ton et
disait le bien, était devenue l’arrière-garde, conduite au pas
cadencé : « han, dé ! han, dé ! ». La sentence tombait.
Pas de bois de justice, pas
de couperet : baffes et coups de pieds au cul.
Il y avait des
protestations, des indignations. Des énarques discouraient. Des politiques
reconnaissaient des erreurs, ils avaient été mal conseillés, mais exigeaient un
vrai procès, et un châtiment moins dégradant. On se gaussait. Un vieux marin à
favoris résumait : « Le peloton d’exécution, pour la
bigaille ? Failli chien de buraliste, qu’est-ce que t’as à
groumer ? t’auras droit au remède des gamins, la pavoine. Pare à
virer ? Envoyez ! »
Najat protestait au nom du droit des femmes à ne pas être
molestées. Un exécuteur des basses œuvres rétorquait : « Vous avez
voulu l’égalité, vous l’avez. »
Coups de pied au prose sans
distinction de race ou de sexe. Ségolène hoquetait : une ignominitude, et se plaignait de n’avoir pas eu
droit à un défenseur, oubliant les qualités de la justice à la chinoise, simple
et rapide.
On proposait le choix à Cécile : « À l’Est, ou à l’Ouest du méridien de
Greenwich ? »
Avant d’administrer le
remède salvateur, l’officiant ou l’officiante (on établissait une rotation non
discriminatoire, il y avait tant de pain sur la planche) scandait :
« Demi-tour… droite ! ».
« Allons, un peu de
bonne volonté ! Penchez-vous. Vous n’allez presque rien sentir », disaient certains dans le style médical.
D’autres prenaient un ton
compassé : « Si Monsieur avait la bonté de tendre un peu le
postérieur… »
Baffes et coups de pied au
cul.
Certains partaient en se
frottant la fesse qui disait merde à l’autre. Brassens aurait bien ri. BHL rétablissait le savant désordonné de sa coiffure…
C’était bon enfant. Plein de
gaieté et de bonne humeur gauloise.
Lavage de cerveau
Un autre copain, qui
ressemblait à l’idée qu’on se fait de Harris, bourru, barbu, le nez rouge,
proposa de chanter des chansons comiques tandis que les prévenus (prévenus,
ô combien, et depuis combien de temps !) recevaient leur médication.
Je protestai ; ça, ce
serait trop cruel.
Cependant, on en venait
aux cohortes des journalistes, des universitaires, des sociologues, des
démographes, des publicitaires, des humoristes, des économistes, des
politologues, des éducatologues, des sexologues… des pompiers incendiaires
d’assoces, aux mines chafouines et au verbe haut, et qui maintenant courbaient
l’échine ; de ces bienfaiteurs de l’Humanité, qui jamais de leur
vie n’avaient accompli une seule heure de travail honnête, comme disait Conrad.
Pour les politiques, ç’avait
été rapide. Là, c’était plus délicat.
Il y avait des gens qui
avaient fait des livres, et qu’on ne pouvait appeler des écrivains ; des
gens qui avaient fait des toiles, et qu’on ne pouvait appeler des
peintres ; des gens qui avaient fait de la musique, et qu’on ne pouvait
appeler des musiciens ; des metteurs en scène, qu’on ne pouvait appeler
des cinéastes…
Le Président du jury
haranguait ses troupes :
- Attention ! Il ne
s’agit pas de juger le fond ou la forme. Nous ne sommes pas là pour ça. Le
navet, même cultivé extensivement, n’est pas un objet de délit. Nous
sanctionnons seulement l’œuvre z’artistique qu’en tant qu’outil de
propagande !
Ce n’était pas facile, sauf
s’il s’agissait de quelque machine évidemment destinée à décérébrer le Français
moyen, dans le genre de « Plus belle la Vie ».
Des témoins apportaient des
bouquins, des photos, des cassettes vidéo, des enregistrements, les
distribuaient à des experts en lavage de cerveau.
Il y avait beaucoup de
non-coupables, au bénéfice du doute. Des sympathies jouaient. Untel ou Unetelle
avaient du talent. Kassovitz
avait obtenu un César. Le Président observa que Leni Riefenstahl ou Sergueï
Eisenstein en avaient aussi, du talent, mis au service de sales idées.
Balasko les avait bien rire.
- Pas dans ce film,
remarquait un examinateur. Un policier. Cette femme-là… C’est fou, quand un acteur se met en scène, ce que
ça peut produire comme naveton…
- Sinon ?
- Une petite promo de
l’homosexualité masculine, glissée dans le scénar.
- Bof.
- Côté navet, j’en ai un
autre, dans le genre comique. Pas pu aller au bout. Et le pauvre Carmet qui
s’est fourré là-dedans. Un sac de merde.
- Ça lui va bien. Balasko,
ses idées politiques étaient à la hauteur de ses talents de scénariste.
- Non, non. Sac de Noeuds, c’est le titre du film.
Et la cassette alla
rejoindre des milliers d’autres, dans les poubelles débordantes. Trente ans de
littérature engagée, d’artistes à messages, de journalisme bien-pensant,
d’orthodoxes de la contestation, d’éradicateurs de mauvaises pensées,
d’indignation sélectives, d’inquisition chattemite, de piafferies à micro, cela
cubait.
On baissait les bras.
Les examinateurs se
frottaient les yeux de fatigue.
-Dupont Lajoie, réalisateur Yves Boisset, 1974. Une jeune fille violée, et par qui ? Une
sale franchouillard, bien sûr. Comme s’il n’y avait pas d’autre choix, plus
probable…
La cassette voltigea vers le
tas d’ordures.
- Et celle-là, qu’est-ce que
vous en pensez, patron ? Un type qui se transforme en chien, ou le
contraire. Ça s’appelle Didier. Drôle comme tout.
- Et alors ?
- Sans rapport évident avec
l’histoire, y’a une manif’ de bourgeois qui crient : « Ni bâbord, ni
tribord, la Nation d’abord ! » « Des cons », commente Bacri qui doit vivre dans une mansarde, et gagner le SMIC.
- Bacri, j’adore ! Mais
ce n’est pas la question. Vous en avez vu beaucoup, de ce genre de défilé, dans
les années quatre-vingt dix ? Ils auraient pu trouver des manifestants plus
crédibles. Ensuite ?
- La manif est encadrée par
des gros bras genre néo-nazis.
- Exemple évident de
conditionnement subliminal, conclut le Président qui aimait les mots savants,
mais ne les employait pas toujours à bon escient. Le réalisateur, le
scénariste ?
- Alain Chabat. Il est vraiment très drôle, dans le rôle du chien.
Et l’histoire est marrante…
Didier fut innocenté, parce qu’avant tout on aimait rire,
et qu’on n’avait pas de rancune.
La Journée des Giroflées
Finalement, on décida
d’amnistier, en bloc. Il y avait trop de monde, et c’était l’heure du
casse-croûte, et puis Georges avait l’habitude de manger à heure fixe, sinon
son estomac lui jouait des tours, ce qui le rendait inapte pour son travail à
la City. Harris se gaussa : il appelait ça du travail !
Des bouteilles furent
débouchées (celles d’Harris étaient déjà vides). On porta des toasts. Aux
Français. Aux Musulmans de France. Aux Juifs de France. Aux Chinois de France.
Aux femmes de France et d’ailleurs. Aux Africains de France. À tous ceux qui
aimaient la Maison France.
C’était le Grand Pardon, par
la vertu curative de quelques nasardes et coups de pompes dans le derche. Du
Molière !
Il y avait des discours un
peu pâteux, des plaisanteries vaseuses, et on riait, à en étouffer. On se
tapait sur les cuisses.
Un artiste grattait sa
guitare et chantait :
« Ô
vous les arracheurs de dents,
« Vous
les cafards les charlatans,
« Les
prophèèètes !
« Comptez
plus sur le contribuab’
« Pour
payer les violons du bal
« À
vos fêtes !
Et on reprenait en
chœur :
« À
vos fê-ê-tes ! »
C’est Brassens qui aurait
été content !
On décida de faire de ce
jour une grande fête de la Réconciliation des Français, jour férié
naturellement, qu’on célébrerait chaque année sous le nom de :
LA JOURNÉE DES GIROFLÉES
Je rigolais, je rigolais.
C’est cela qui m’a réveillé.
*************
Petit lexique, d’après
Armand Hayet, ancien Capitaine au Long Cours
Bigaille :
Pour les pécheurs, le menu fretin. Par extension, les gamins, tout ce qui n’est
pas un « homme ».
Failli
chien de buraliste : Failli : bon à rien ; buraliste : confusion
avec bureaucrate, fonctionnaire.
Bourrade :
coup de poing appliqué sur le dos d’un marin faisant peu d’effort pour hâler
une manœuvre, et de ce fait augmentant le travail de ses camarades.
Groumer :
rouspéter.
Pare-à-virer :
vigoureuse manifestation de mécontentement administrée au matelot indécis ou
paresseux, pour le rappeler à son devoir. Pare à virer est le premier des
ordres précédant un virement de bord. Il est suivi de « envoyer »,
qui indique au timonier d’aller au vent, tandis que l’équipage manœuvre la
voilure.
Pavoine :
gifle.
A l’attention de René-Pierre Samary
RépondreSupprimerLa lecture de votre blog 2014 m’a inspiré des commentaires.
Je souhaiterais vous les transmettre par messagerie (Fichier pdf – 272 Ko).
Pouvez-vous me communiquer une adresse permettant l’opération ?
Merci et bonne journée.
Daniel LUTRIN
133 chemin de la Valette
38460 – Vénérieu
FRANCE
------------------------------
33 04 74 92 89 09
danga.l@orange.fr
Ce courrier et ses pièces jointes sont établis à l'intention exclusive de ses destinataires. Si vous recevez ce message par erreur, merci de le détruire et d'en avertir immédiatement l'expéditeur par e-mail.
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Pourquoi ne pas les envoyer ici ?
RépondreSupprimerCordialement, RPS
A l’attention de René-Pierre Samary
SupprimerCe que je souhaitais vous dire s’inscrit dans la recommandation faite dans L’Instinct de Conservation que vous citez dans votre billet du 30 avril : « Immodeste et sans vergogne, l’Occident gagnerait à retrouver cette retenue, cette réserve qui correspond à l’art de maintenir l’ordre privé séparé de l’ordre public. ». Mes commentaires relatifs à vos écrits relèvent, à mes yeux, de l’ordre du privé et je ne souhaitais pas les exposer en public. C’est mon choix en matière de communication sur Internet, depuis bientôt dix-sept ans.
Très courtoisement.
Daniel LUTRIN
la giroflée, c'est très féminin, finalement ;)
RépondreSupprimerMais notre bon mignon et le féminin,
RépondreSupprimerça le fait pas trop ......